• il y a 3 heures
Agnès Levallois, vice-présidente de l’Institut de Recherche et d’Etudes Méditerranée Moyen-Orient (iReMMO) et Alain Dieckhoff, sociologue, directeur de recherche au centre de recherche international de Sciences Po sont les invités du Grand entretien.

Retrouvez tous les entretiens de 8h20 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-du-week-end

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Transcription
00:00C'est normalement le jour J au Proche-Orient après 15 mois de guerre, 1 200 morts au moins
00:04côté israélien, plus de 46 000 côté palestinien.
00:07Les armes devraient se taire ? Début attendu du cessez-le-feu finalement négocié entre
00:12Israël et le Hamas palestinien, interruption des frappes, prisonniers relâchés contre
00:17libération des otages israéliens du 7 octobre 2023.
00:20Est-ce le commencement, les prémices d'un espoir de paix ? En tout cas, le processus
00:24est pour le moment, je vous parle en temps réel, suspendu, Israël mène à nouveau
00:29des frappes parce qu'il attend une liste des otages qui doivent être libérés par
00:33le Hamas, liste retardée du Hamas pour des raisons techniques.
00:37Sur le terrain, on va essayer de décrypter tout ça avec nos deux invités ce matin,
00:42Agnès Levallois, vice-présidente de l'Institut de Recherche et d'Études Méditerranéennes
00:47Moyen-Orient enseignant à Sciences Po Paris et directrice de l'ouvrage Le Livre Noir
00:52de Gaza.
00:53Bonjour.
00:54Bonjour.
00:55Et Alain Dikhoff, sociologue, directeur de recherche au CERI, le Centre de Recherche
00:57Internationale de Sciences Po.
00:59Bonjour également.
01:00Bonjour.
01:01Merci à tous les deux de venir nous éclairer sur ce sujet qui est si sensible, qui est
01:03si complexe.
01:05Chers auditeurs, vous pouvez leur poser vos questions 0145 24 7000 et également sur
01:10l'application France Inter.
01:12Alors, vos premiers mots d'abord, pour commencer, sur cette trêve qui devait entrer
01:17en vigueur à 7h30, forcée de constater que ce n'est pas le cas, Agnès Levallois.
01:21Oui, on sait que cet accord qui a été patiemment négocié est extrêmement compliqué, extrêmement
01:27fragile.
01:28La preuve en est qu'effectivement, il n'a pas pu entrer en vigueur selon les termes
01:32de l'accord qui avait été annoncé.
01:34On sait que dans la bande de Gaza, évidemment, que la situation est tellement compliquée
01:39avec tout ce qui s'est passé depuis 15 mois et que le Hamas n'a pas forcément la maîtrise
01:45complète de l'ensemble des groupes dont certains peuvent encore retenir des otages.
01:50Et donc, cela peut expliquer, évidemment, je n'ai pas la raison compliquée de savoir
01:55exactement ce qui se joue actuellement, mais c'est vrai que ça, c'est un élément
01:59qui peut tout à fait rentrer en considération lorsque l'on voit la complexité de cette
02:03opération.
02:04Alors Alain Dicoff, je le disais, le Hamas a retardé donc la publication de la liste
02:08des otages.
02:09Agnès Levallois nous donnait peut-être un élément d'explication.
02:11« Pas de liste, pas de trêve », c'est ce que dit le gouvernement israélien.
02:15Ça vous surprend que ce démarrage soit aussi poussif ?
02:18Je ne pourrais pas évidemment prévoir que ça poserait des problèmes dès le départ
02:24mais c'est évident qu'étant donné la complexité de cet accord qui est basé sur
02:27trois phases, avec quand même des parties qui évidemment n'ont aucune confiance l'une
02:33envers l'autre, ils ont quand même été 15 mois en guerre, évidemment c'est très
02:38compliqué à faire fonctionner.
02:40Donc que ce soit qu'il y ait des problèmes au démarrage ne me surprend pas outre mesure
02:46mais ces problèmes, même s'ils sont réglés là, ils peuvent ressurgir à la fin de la
02:50première phase, dans 42 jours, quand on passera la deuxième, on peut nous voir avoir
02:54des problèmes sur savoir qui on va échanger d'un côté de l'autre, à quel rythme,
03:01enfin bref tout ça est quand même en effet très très compliqué et exigera encore un
03:07travail important des médiateurs.
03:09Ces otages israéliens du 7 octobre 2023 contre prisonniers palestiniens, à chaque fois c'est
03:14une centaine, 150 prisonniers palestiniens libérés en échange de ces otages israéliens.
03:20Agnès Levallois, vous êtes confiante, alors évidemment impossible de lire l'avenir,
03:24mais vous êtes confiante dans le fait que malgré tout cet accord, il va démarrer un
03:27moment, il va être mis en place où tout peut rater d'un coup.
03:30Je pense qu'il va quand même démarrer cet accord, il me semble que la pression quand
03:34même qui a été exercée par Trump pour avoir, qu'il puisse annoncer que c'est lui
03:39qui est à la manœuvre, même si cet accord a été négocié par l'administration précédente
03:43évidemment.
03:44On dit qu'ils ont négocié main dans la main.
03:46Oui, mais on sait très bien que cet accord est quand même l'accord qui avait été
03:50négocié en mai 2024, donc ça à l'époque c'était l'administration Biden, qu'à
03:54l'époque cet accord en particulier Netanyahou l'avait refusé et donc on est reparti quand
03:59même sur les mêmes bases, qu'il n'y a pas dix mille façons d'engager la négociation
04:03pour arriver à un cessez-le-feu.
04:04Donc Trump a quand même besoin je crois de ce succès, je crois qu'il a tordu le bras
04:09à Netanyahou pour que Netanyahou quand même l'accepte.
04:12Donc pour ces différentes raisons, je ne vois pas Netanyahou rentrer en confrontation
04:16directement avec Trump sur ce sujet alors que lui souhaite et veut montrer que c'est
04:21le faiseur de paix.
04:22C'est quand même les grandes déclarations de Trump dans ce domaine.
04:24Donc ça me fait penser que cet accord va rentrer en vigueur, après comment les différentes
04:31phases même au sein même de la première phase qui doit durer 42 jours, à tout moment
04:36ça peut déraper.
04:37Mais symboliquement je pense quand même qu'il devrait rentrer en vigueur avant demain pour
04:42justement permettre à Trump de montrer que c'est lui qui est à la main d'œuvre même
04:45si ce n'est pas lui qui a toutes les cartes, bien évidemment.
04:48Pour expliquer les phases, la première phase qui dure 42 jours c'est la libération d'otages
04:52et de prisonniers et puis arrêt évidemment des frappes.
04:54Après il y a une deuxième phase qui est la libération du reste des otages et ensuite
04:57troisième phase la reconstruction, là on en est peut-être au début de la première
05:02phase.
05:03Alain Dicoff c'est vrai que dès le départ, dès l'annonce de cet accord au milieu de
05:06la semaine, les sentiments étaient mitigés et puis il y a eu la méfiance du premier
05:09ministre Netanyahou qui l'a dit dès hier, nous nous gardons le droit de reprendre la
05:13guerre si besoin, d'ailleurs les frappes continuent.
05:16Quel est selon vous le sentiment dominant ? Parce qu'on a vu aussi la joie des deux
05:19parties d'ailleurs, des deux côtés.
05:20Alors moi je pense que ça permet d'introduire en effet les dimensions internes qui me paraissent
05:25très importantes du côté israélien comme du côté palestinien.
05:28Alors du côté israélien ce qu'il faut voir c'est qu'il y a des raisons qui font
05:32aussi que, je dirais, Israël de façon globale souhaite aussi que cette guerre s'arrête.
05:40Pourquoi ? D'abord il y a des limites opérationnelles, c'est-à-dire que ça fait 15 mois que la
05:48guerre dure, certainement en effet que le Hamas a été considérablement affaibli vu
05:55les bombardements et les destructions, c'est même certain.
05:58Mais pas éliminé, ce qui était le but de guerre.
06:00Et ça je pense que de toute façon les personnes qui avaient été peut-être un peu considérées
06:06peut-être comme des cassandres à l'époque avaient dit que de toute façon ce but ne
06:09serait certainement jamais atteint, c'est-à-dire que le Hamas d'une façon ou d'une autre,
06:13même affaibli, continuera à exister, au moins politiquement.
06:15C'est visiblement le cas.
06:17Donc ça c'est un élément du côté israélien, c'est-à-dire qu'il y a quand même une limite
06:22de cette stratégie de la guerre à outrance et permanente, qui va de pair avec une certaine
06:28lassitude du côté de l'armée.
06:30Il faut quand même savoir que les dernières offensives se sont beaucoup concentrées sur
06:35le Nord, qui avait été justement considérée comme à un moment, vers le printemps dernier,
06:42comme finalement une terre où le Hamas n'était plus présente.
06:45Or ils sont encore là.
06:46Et l'armée a perdu 50 hommes quand même au cours des trois derniers mois, rien qu'au
06:51Nord.
06:52Donc il y a quand même un coup humain dont on a peut-être moins conscience ici mais
06:55qui est quand même aussi réel.
06:56Même s'il y a beaucoup moins de morts qu'au côté palestinien.
06:59Évidemment, mais vous savez, les soldats en Israël, ça compte beaucoup et ça touche
07:04tout le monde.
07:05Et les otages aussi.
07:06Bien sûr, mais là je parlais vraiment des limites opérationnelles.
07:08Et du coup ça rend la guerre aussi beaucoup moins populaire du côté israélien.
07:12On a beaucoup de sondages qui montrent que, contrairement à ce qui se passait au début,
07:16entre 60 et 70% des populations israéliennes considèrent qu'il faut mettre un terme à
07:19la guerre.
07:20Donc tout ça, ça joue.
07:21Ce qui retient un peu Netanyahou, c'est évidemment sa coalition.
07:25Parce que pour l'instant, il dépend, pour sa survie, de la présence des ministres d'extrême
07:29droite et donc des partis d'extrême droite.
07:31Et il sait très bien que cet accord, l'extrême droite n'en veut pas.
07:34Donc il est obligé de naviguer entre tout cela, entre ce qui vient de l'armée, de
07:38la population et la dimension interne.
07:41Et donc ça explique aussi un peu les allers-retours, les hésitations, etc.
07:45Je dirais que du côté palestinien, on a quelque chose un peu du même style.
07:48Il y a aussi des raisons qui font que le Hamas aujourd'hui est prêt à souscrire à cet
07:52accord alors qu'il n'était pas prêt il y a quelques mois.
07:54C'est que, quelque part, la stratégie de Sinouar, de son chef, qui a été tué par
07:58Israël il y a quelques mois, qui était finalement d'entraîner la région dans une guerre
08:05afro-multiple, elle n'a pas fonctionné.
08:08Au contraire, non seulement elle n'a pas fonctionné, mais finalement, les Israéliens
08:12sont parvenus à décimer l'état-major du Hezbollah.
08:16Là, l'Iran a quand même été globalement affaibli par la perte de la Syrie, évidemment.
08:22Sur laquelle Israël n'a pas joué un rôle direct, mais quand même, il y a un changement
08:27de pouvoir à Damas et donc ça fait que l'arc chiite ne fonctionne plus.
08:33Donc le Hamas, objectivement, il est aussi affaibli.
08:35Donc il a intérêt aussi, lui, à rentrer dans cette logique, sans compter l'épuisement
08:40de sa population qui est aussi énorme, évidemment.
08:42Chacun a ses intérêts, on l'a compris, mais Agnès Levallois, est-ce qu'il est équilibré
08:46cet accord ? Parce qu'un otage contre 100 ou 150 prisonniers qui seraient libérés
08:51de l'autre côté des Palestiniens, libérés par les Israéliens, 33 otages israéliens
08:57qui vont être libérés sur 98, donc pas tous en tout cas dans un premier temps.
09:01Est-il équilibré cet accord ?
09:02En fait, dans tous les accords précédents qui ont consisté à obtenir la libération
09:07de prisonniers palestiniens contre des otages, parce que finalement, la carte dont disposent
09:11les Palestiniens pour essayer d'obtenir la libération des prisonniers palestiniens
09:15s'intuit de prendre des otages israéliens et de négocier à partir de là.
09:19Et dans l'histoire, on a eu, rappelez-vous, la libération de Gilad Chalit, qui était
09:23ce soldat franco-israélien qui avait été libéré à l'époque contre plus de 1000,
09:28je ne sais plus le chiffre exact, mais contre plus de 1000 prisonniers palestiniens.
09:31Dont un certain nombre de terroristes, d'ailleurs.
09:34Yahy Hassinouar qui faisait partie, effectivement, des libérés, même si à l'époque, il y
09:38avait un des responsables du Mossad, si mes souvenirs sont bons, qui était opposé, qui
09:42l'avait traité en prison et qui considérait que c'était une erreur de le libérer.
09:46Donc c'est vrai que la question de la prise d'otages par les Palestiniens et en particulier
09:52le Hamas pour obtenir la libération des prisonniers palestiniens a toujours été une stratégie
09:56qui a été mise en avant.
09:58Et c'est vrai que le nombre de prisonniers palestiniens est énorme et depuis le 7 octobre,
10:02les prisons sont remplies de prisonniers palestiniens, souvent sous le statut de détenus administratifs,
10:09c'est-à-dire qu'ils peuvent rester en prison des mois, des années, sans procès.
10:12Et donc c'est vrai que c'est une carte qu'utilisent les Palestiniens pour montrer aussi, pour
10:19justifier la stratégie qu'ils mènent en disant, nous, effectivement, on mène cette
10:23stratégie parce que c'est la seule carte que l'on a pour obtenir la libération des
10:26otages.
10:27Et donc dans la négociation, évidemment, il y a un déséquilibre très très important
10:31entre d'un côté le nombre d'otages israéliens qui devraient être libérés contre ces fameux
10:36prisonniers palestiniens.
10:37Alors Alain Dikhoff, on a une question dédiée sur l'application de France Inter.
10:41Comment est-il possible de sortir des otages de la bande de Gaza quand Israël ne fait
10:45que bombarder la zone ? Ils ne peuvent pas se déplacer.
10:48Les frappes doivent s'arrêter en principe.
10:52Oui, bien sûr, les frappes doivent s'arrêter.
10:55Ce qui n'est pas le cas pour le moment, je précise.
10:57Non, non, non, puisque justement l'accord tarde à être mis en œuvre.
11:02Mais bien évidemment, on a quand même un précédent en novembre 2023, le seul moment
11:08où il y a eu un échange du même type.
11:10Finalement, ça s'est passé dans de bonnes conditions.
11:13Il n'y a pas eu de frappe à ce moment-là.
11:16Tout ça a été géré par la Croix-Rouge.
11:19Donc, ils ont l'habitude, la Croix-Rouge a l'habitude de ce type de choses.
11:23Donc, c'est tout à fait faisable.
11:25Alors peut-être, j'ajouterais peut-être aussi sur la question des libérations.
11:28Alors, c'est vrai que le ratio a toujours été, je dirais, toujours beaucoup plus de
11:33Palestiniens libérés que d'Israéliens.
11:35Mais là, si vous regardez le ratio par rapport à l'échange avec Gilad Chalid, il est
11:41moins élevé. Et ce qu'il faut quand même dire, c'est que, peut-être aussi pour que
11:45vos éditeurs se rendent compte, ce n'est pas évident non plus en Israël de vendre
11:49cet accord à tout le monde, en particulier à ceux qui ont perdu quand même des
11:53proches dans des attentats.
11:54Parce qu'il y a quand même des gens qui vont être libérés, qui sont des meurtriers.
11:57Il faut le dire clairement. Des gens qui ont été impliqués dans des attentats et qui
12:00ont été condamnés à prison à vie et qui vont être libérés dans cet accord.
12:04Donc, pas seulement, mais ça ne va pas être facile.
12:07Ce qui vont être libérés aussi, c'est beaucoup de plus de mille Palestiniens qui ont
12:11été arrêtés depuis le 8 octobre 2023.
12:14Donc, en plus des prisonniers, des vrais prisonniers.
12:18Agnès Levallois, dans l'accord, il y a aussi l'augmentation attendue de l'aide humanitaire
12:22dès la première phase. En fait, 600 camions chargés d'aide qui devraient rentrer chaque
12:26jour à Gaza par le point de passage de Rafah.
12:28Aujourd'hui, c'est 70.
12:30Il y a une urgence vitale, cette aide humanitaire ?
12:33Ah oui, alors là, c'est vraiment une urgence au-delà de ce que l'on peut imaginer.
12:38Lorsque l'on sait que depuis maintenant des mois, il y a une moyenne de 40, 50, 60
12:43camions, alors que le minimum est de 500 camions par jour.
12:46Et donc, aujourd'hui, il y a une situation de famine dans la bande de Gaza, avec des
12:51personnes, des bébés qui meurent parce qu'il n'y a pas de quoi les nourrir ou il n'y a
12:55pas de quoi soigner les malades.
12:57Donc, on est dans une situation d'urgence humanitaire absolue.
13:01Et je pense que c'est aussi ce qui a effectivement convaincu le Hamas qu'il fallait
13:05absolument aller vers cet accord, parce que le Hamas ne pouvait plus tenir face à la
13:10population de Gaza, qui vit dans des conditions absolument inimaginables.
13:15Donc, oui, cette urgence, et ça, c'est le point vraiment, pour les Palestiniens de
13:18Gaza, en tous les cas, c'est vraiment le point fort et c'est l'attente première.
13:22C'est d'abord d'arrêter les bombardements et de permettre de retrouver une vie.
13:26Et d'ailleurs, il y avait un témoignage hier d'un journaliste palestinien que vous
13:29connaissez, Rami Abou-Jamous, et qui disait qu'il était allé au marché hier matin
13:34et qu'il voyait que déjà, la vie commençait un peu à reprendre, un peu par
13:38anticipation, puisque l'accord n'était pas encore rentré en vigueur et que déjà, on
13:42trouvait un peu plus quand même de nourriture sur les marchés et à des prix
13:48surtout qui redevenaient un peu plus normal.
13:50Parce qu'à un moment, le poulet était 20 fois plus cher qu'auparavant et que là,
13:53c'était juste trois ou quatre fois plus cher.
13:55Donc, ça commençait à montrer une espèce de prémisse de vie qui pouvait reprendre.
13:59Et il a raconté que les Gazaouis sur ce marché avaient tous à nouveau le sourire
14:04en disant ça y est, enfin, ce cauchemar se termine.
14:06Et ça, c'est peut-être un espoir.
14:08Effectivement, Alain Dicoff, il y a Bull de Toulon qui nous a écrit sur l'application
14:13France Inter et elle nous parle de quelque chose qui a peut-être freiné aussi la mise
14:17en place de cet accord qui n'est pas encore en vigueur.
14:20Est-ce qu'il y a une vraie chance que Netanyahou, le Premier ministre israélien,
14:23après la guerre, soit jugé à la haie et mis en prison ?
14:27Alors, il est déjà accusé de corruption dans son pays ?
14:29Oui, alors ça, c'est une autre affaire, en quelque sorte, une série d'affaires.
14:34D'ailleurs, il a trois, quatre affaires pendantes en Israël même.
14:37Est-ce que ça a pu freiner déjà l'entrée en vigueur de cet accord ?
14:42La question de la Cour pénale internationale, à mon avis, non.
14:45Je dirais que c'est indépendant de l'accord.
14:50Mais en revanche, évidemment, la question risque de se poser un jour dans l'après
14:55guerre, pour lui en particulier, parce que c'est évident que c'est quelque chose
14:59qui va peser sur sa capacité d'agir,
15:03puisque quelque part, ça va limiter sa capacité à se déplacer.
15:07Parce qu'il peut y avoir un risque, en effet,
15:09qu'il se fasse arrêter dans les pays nombreux
15:12qui ont signé l'accord sur la CPI.
15:17J'ajouterais juste un point, c'est que, effectivement,
15:20l'inquiétude aussi de Netanyahou, c'est qu'une fois la guerre cessée,
15:24il va falloir aussi lancer une commission d'enquête sur ce qui s'est passé le 7 octobre.
15:28Et que ça, c'est un élément qui inquiète quand même Netanyahou,
15:31puisque, sans que l'on sache exactement ce qui s'est passé,
15:34mais il y a en tous les cas un certain nombre d'interrogations qui devront être
15:37levées pour expliquer comment ces terribles massacres ont pu se dérouler
15:43et qu'elle a été la faillite quand même du côté du renseignement israélien
15:47ou de la prise de décision par le niveau politique, l'échelon politique,
15:51des informations qui avaient été transmises par les services de renseignement.
15:54Et ça, pour Netanyahou, c'est quand même, je pense, aussi une échéance qui est assez inquiétante.
15:59Alors Alain Dicoff, on parlait tout à l'heure du rôle joué par l'arrivée imminente
16:04de Donald Trump, qui avait promis le pire aux belligérants.
16:06On s'en rappelle, si une trêve n'intervenait pas rapidement.
16:10Ici, à France Inter, l'ancien ambassadeur d'Israël en France, Elie Barnavi,
16:13disait que Trump avait aboyé sur Netanyahou.
16:16Vous reprendriez ces termes ?
16:18Je ne savais pas qu'Elie Barnavi l'avait utilisé.
16:21Il l'a dit cette semaine.
16:22Non, non, mais je pense que oui, c'est un petit peu ça.
16:24Et en particulier, l'envoyé spécial sur le Moyen-Orient,
16:30l'envoyé spécial de Trump, qui s'appelle Steve Witkoff, a été,
16:34en effet, très, très clair et très, très ferme vis-à-vis Netanyahou pour obtenir cet accord.
16:41Donc, je pense que ça me conduit à penser que
16:46on ne sait pas exactement ce que l'administration Trump va faire.
16:48Mais je pense qu'elle sera, en effet, certainement assez activiste,
16:51c'est-à-dire qu'elle ne craindra pas d'utiliser de façon très explicite le rapport de force.
16:56Sans doute plus que Biden ne l'a fait.
16:58Alors, je ne sais pas pour obtenir quoi exactement et dans quel sens.
17:02Mais je pense qu'en effet, il serait dans une politique vraiment très,
17:04très claire de rapport de force et de domination en montrant, en gros,
17:07qui est le patron, c'est-à-dire les Etats-Unis.
17:09Parce qu'Agnès Lavallois, la question se pose effectivement dans quel sens elle va aller.
17:12Parce qu'elle est considérée comme très pro-israélienne, cette administration.
17:15Certains ont dit qu'ils ne croyaient pas du tout à la solution à deux Etats.
17:18Certains disent que la Cisjordanie n'est pas occupée.
17:21Donc, qu'est-ce qu'on peut en attendre ?
17:23Mais justement, c'est vraiment la grande inconnue,
17:27puisque tout l'entourage de Trump en charge du Moyen-Orient dit clairement
17:32qu'il n'y aura pas de solution à deux Etats.
17:35Il n'y a aucune considération pour les droits des Palestiniens.
17:38Et d'ailleurs, c'est ce que disait Elias Samba,
17:40qui a négocié les accords d'Oslo et qui est lui, donc, palestinien,
17:43qui disait que la solution à deux Etats, c'est fini, c'est mort, c'est terminé.
17:46Parce que concrètement, sur le terrain,
17:48de toute façon, elle n'est plus possible à mettre en œuvre.
17:52Donc, cette question, pour l'instant, je pense qu'elle est complètement suspendue.
17:56Donc, l'entourage de Trump est quand même un entourage qui considère
17:59que l'annexion de la Cisjordanie est tout à fait naturelle.
18:02Il y a eu plusieurs propos en ce sens.
18:04Là où moi, je me pose la question, mais je n'ai à ce stade pas la réponse,
18:07c'est qu'on sait aussi très bien que Trump veut absolument reprendre
18:10ces fameux accords d'Abraham, les accords de normalisation avec les pays arabes.
18:13Qui ont été signés par les Émirats, le Maroc, le Soudan et Bahreïn en 2020.
18:17Il veut absolument attirer l'Arabie saoudite dans ces accords.
18:20Or, l'Arabie saoudite, aujourd'hui,
18:23le prince héritier, Mohamed Salman, ne peut pas signer ces accords
18:27puisqu'il a durci sa position en disant il y aura accord de normalisation
18:31s'il y a une solution et des vrais droits accordés aux Palestiniens.
18:34Et donc là, il y a une équation.
18:36Je ne sais pas comment elle va être résolue, puisque d'un côté,
18:39on a Israël et les Américains, en gros,
18:43hors de question d'aller vers une solution pour les Palestiniens,
18:46mais voulant absolument négocier avec l'Arabie saoudite,
18:48qui, elle, doit absolument montrer à sa population,
18:52qui est très, très, très pro-palestinienne,
18:54qu'elle n'a pas lâché les Palestiniens,
18:56à la différence des Émirats qui ont signé ces fameux accords d'Abraham.
19:00On voit à quel point c'est fragile et délicat.
19:02En fil au standard de France Inter,
19:04on a beaucoup de questions d'auditeurs,
19:05notamment Frédéric, qui nous appelle de Pau.
19:08Bonjour Frédéric.
19:09– Bonjour à tous, je vais rebondir un petit peu sur ce qui vient d'être dit.
19:12On invoque, pour justifier toutes les guerres menées en particulier par Israël,
19:17son droit inaliénable à sa sécurité.
19:20Alors déjà, le concept de droit inaliénable à la sécurité de la puissance occupante,
19:26qui est par ailleurs puissance nucléaire, me gêne un peu.
19:29Moi, j'aimerais savoir, par contre,
19:31quand est-ce qu'on va parler du droit inaliénable,
19:33non seulement à la sécurité des Palestiniens,
19:36mais à leur résistance, sans être victime, disons, tous les deux ans de massacres
19:43par une puissance qui est l'une des plus grosses armées du monde,
19:48sans subir de massacres connus, comme certains l'ont dit récemment,
19:51dans le temps des avisables génocides ?
19:53– Alors c'est un commentaire de votre part Frédéric.
19:56Alain Dikhoff, votre réponse.
19:59– Le droit à l'autodétermination des Palestiniens
20:02au niveau des instances internationales,
20:05il a été clairement reconnu par l'ONU.
20:08Je veux dire, toutes les instances de l'ONU ont reconnu ce droit.
20:13Et de façon générale, la plupart des États à travers le monde,
20:18y compris les États-Unis, l'ont reconnu.
20:20Même Israël, en réalité, l'a reconnu dans une certaine mesure.
20:25– Donc chacun avait le droit de se défendre ?
20:28– Oui, alors après, la mise en œuvre, ça c'est évidemment toute la difficulté.
20:31Comment arriver à mettre en œuvre ce droit ?
20:36C'est la question qui reste non réglée depuis 1967.
20:40– Alors on arrive à Agnès Cavallaro.
20:42– Moi je suis persuadée d'une chose, juste un petit commentaire,
20:43c'est que de toute façon il n'y aura pas de sécurité pour Israël
20:46tant qu'il n'y aura pas une sécurité pour les Palestiniens.
20:48Donc tant qu'on n'arrivera pas à une solution
20:50où effectivement les droits des Palestiniens seront reconnus,
20:52pour éviter ce que disait l'auditeur,
20:54que tous les ans ou tous les deux ans,
20:56on ait à nouveau des conflits et des combats absolument meurtriers.
21:01Donc effectivement, ça ne passera pas par une autre piste
21:03que celle de la solution où le droit des Palestiniens est reconnu
21:07pour assurer la sécurité des deux.
21:08– Alors en un mot à chacun, puisque l'entretien touche à sa fin,
21:12mais Alain Dicoff, est-ce qu'il est trop tôt pour prononcer,
21:14pour imaginer le mot paix avec toutes les violences qu'on a connues
21:17et toutes les conséquences qu'il y a eu ?
21:19– Malheureusement oui, je crois qu'il faut être quand même réaliste,
21:21oui c'est certainement trop tôt,
21:22surtout après cette rivière de sang des quinze derniers mois.
21:28Mais évidemment, il faut garder quand même l'espoir
21:31et imaginer quand même que cette paix viendra un jour
21:36et il faut de ce point de vue-là, saluer certaines initiatives qui existent,
21:40comme par exemple, je voudrais juste en citer une,
21:42l'idée d'avoir finalement une patrie,
21:45ce qui serait l'ensemble de l'espace entre la Méditerranée et le Jourdain,
21:48avec deux États.
21:49Je pense qu'il y a des groupes qui, malgré la violence
21:52à laquelle on a assisté ces quinze derniers mois,
21:54continuent à travailler dans cet esprit.
21:55– Vous y croyez encore ? Agnès Levallois en un mot ?
21:57– Difficile en ce moment, j'ai du mal à croire à cette paix,
22:00même si effectivement, si ce cessez-le-feu rentre en vigueur,
22:04eh bien l'espoir, mais très inquiète quand même
22:06par ce que va pouvoir faire l'administration américaine,
22:08parce que je pense que ce qu'a fait Trump dans son premier mandat
22:11a conduit quand même à la situation dans laquelle nous sommes aujourd'hui,
22:14donc ce qui me rend quand même à ce stade assez inquiète.
22:17– Agnès Levallois et Alain Dicoff,
22:19merci beaucoup d'être venus aujourd'hui sur France Inter.

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